22 février 2009
7
22
/02
/février
/2009
11:26
Comparaison n'est pas raison et l'Histoire ne repasse pas les plats. Cependant, elle a une curieuse propension à rappeler aux générations les réalités qui ont fondé les contrats sociaux des peuples et des nations et, particulièrement en France le Contrat social issu des Lumières et de la Révolution de 1789.
Pour aborder la situation en Guadeloupe et affirmer derechef qu'elle peut préfigurer des lendemains houleux non seulement en métropole mais dans plusieurs pays de l'Europe, il nous faut faire un petit retour en arrière.
Au préalable, nous exécutons immédiatement la nouvelle Marie-Antoinette, à savoir le turlupin Jacques Séguéla qui, dans sa vulgarité la plus absolue écrite et parlée « rodomonte » sur les ondes:
"Comment peut-on reprocher à un président de la République (à Marie Antoinette) d'avoir une Rolex (un collier de la reine)?
Enfin, tout le monde à une Rolex! Si, à 50 ans, on n'a pas une Rolex, c'est qu'on a raté sa vie".
Il semblerait que Marie-Antoinette finit sa vie bien plus mal qu'elle n'avait commencé.
Nous exécutons dans la foulée, Florence Parisot, qui confirme sur les ondes de la radio Europe ce dimanche 22 février, que c'est elle qui a demandé le rappel du ministre Yves Jégot au président de l'Arépublique, aux fins de remettre en cause les promesses sur lesquelles le secrétaire d'Etat s'était engagé à l'issue des rencontres avec les partenaires sociaux de Guadeloupe et notamment le LKP. En ce sens, la patronne du Medef porte une lourde responsabilité dans la dramatisation de tous les événements qui ont suivi le rappel du sous-ministre Jégot.
Venons-en à l'Histoire.
La guerre des farines et les accapareurs. Source Wikipedia
La guerre des farines (l'expression, contemporaine des évènements, fut retenue par l'historiographie) désigne une vague d'émeutes survenues d'avril à mai 1775 dans les parties nord, est et ouest du royaume de France. Elle fait suite à une hausse des prix des grains et consécutivement du pain du fait des mauvaises récoltes des étés 1773 - 1774. Cette révolte singulière par son échelle fut réglée par un contrôle des prix du blé (avant le retour de l'abondance) et l'intervention de la troupe. A travers la révolte frumentaire d'Ancien Régime se manifeste une crise sociale et politique. Ainsi, ces événements peuvent se lire comme une réaction envers l'édit de Turgot qui établit la libéralisation du commerce des grains le 13 septembre 1774 : en effet, cette libéralisation apparaît comme contraire à l'« économie morale », rupture par rapport au principe qui exige du roi de veiller à la sécurité de ses sujets et à leur approvisionnement en denrées.
Les analyses récentes tendent à voir cet événement non pas comme une révolte de la faim, mais comme un témoignage de l'apparition d'une maturité révolutionnaire voire d'un prélude au débat sur le Maximum révolutionnaire. Elle peut être considérée à ce titre comme un événement prérévolutionnaire ou comme un signe avant-coureur de la Révolution. La guerre des Farines s'inscrit dans un mouvement frumentaire plus ancien et annonce les révoltes frumentaires de l'An II.
La critique politique et sociale
* L'idée de libéralisation du commerce des grains est discréditée. A plus long terme, l'expérience économique éloigne les masses paysannes du gouvernement de Versailles.
* Sur le plan de la politique, l'événement provoque des remaniements en sein du gouvernement et un changement de politique royale. Turgot réclame et obtient de la part de Louis XVI la démission du Lieutenant Général de Police Jean-Charles-Pierre Lenoir.
* Certains nombres de libelles, très localisés, mettent en cause du souverain lui-même : on y trouve des attaques contre « le sang des Bourbons », mais ces écrits sont le fait d'une population cultivée et de plumes savantes. Pour Kaplan, l'événement marque le désenchantement grandissant du peuple envers le roi, une étape de la rupture du lien sacré entre le roi et ses sujets.
* Cependant, les émeutes présentent un caractère paradoxal qui témoigne bien des caractéristiques de l'économie morale mis à jour par les historiens E. P. Thompson et Charles Tilly : d'un côté une demande de retour au paternalisme royal et en même temps critique de la politique gouvernementale. Deux logiques s'affrontent : celle qui obéit aux lois de la propriété et celle qui obéit à la morale. Les émeutiers interpellent l'autorité publique et lui demande de rétablir le prix juste. En l'absence de réponse, se met en place une pratique de règles d'un ordre intérieur : le pouvoir de régulation.
* En définitive, ces émeutes sont le signe d'une aspiration à une justice alimentaire, redistributive, qui repose sur une forte demande de régulation et d'encadrement. Les émeutes frumentaires ne peuvent être assimilées à des jacqueries, au sens où elles ne sont pas dressées contre l'autorité politique, elles ne sont pas le fait d'une usurpation de pouvoir mais elles obéissent à une discipline communautaire. L'accès au grain et le juste prix du pain apparaissaient comme des droits universels.
* Sur le plan social, les sources témoignent d'une aggravation des oppositions sociales voire une polarisation sociale : une élite restreinte de fermiers riches s'oppose à une masse de plus en plus pauvre. Les paysans, qualifiés dans certaines sources d'Insurgents, sont accompagnés des syndics des villages - parfois contraints- et des curés de campagne, comme en Normandie.
Les cibles des émeutiers sont ainsi ceux qui se sont émancipés de la discipline communautaire : fermiers et grands exploitants du bassin parisien, et, dans une moindre mesure, les bourgeois des villes. Parfois encore des propriétaires nobles ou ecclésiastiques, fermiers insérés dans le système seigneurial, à l'exemple de Jacques-Pierre de Hericourt, fermier à Cagny, en Brie, seigneur de Chesany.
* De la question frumentaire à la question sociale se manifeste la faiblesse structurelle de l'économie du royaume mais aussi l'apparition d'une nouvelle rhétorique contestataire.
Aujourd'hui, les accapareurs ont pour nom: Bernard Hayot qui détient à lui seul 25% du chiffre d'affaires des 50 premiers groupe afro-antillais (source Mariannen° 618 du 21 février 2009), Robert Parfait (ça ne s'inevnete pas!), propriétaire de la licence Hyper U, Alain Huygues-Despointes et consorts...
Vizille: Réunion des États généraux du Dauphiné (source Wikipedia)
Le 21 juillet 1788, faisant suite à la Journée des Tuiles (7 juin), des notables de la région de Grenoble (bourgeois et notamment juristes) organisent l'Assemblée de Vizille dans le château de l'industriel Claude Périer. Elle réunit sans autorisation royale 50 prêtres, 165 nobles et 276 représentants du Tiers État (parmi eux Jean-Joseph Mounier et Antoine Barnave).
Elle décide de convoquer les états de la province (avec doublement du tiers état), réclame la réunion rapide des États-généraux du royaume (avec également doublement du tiers état) et l'admission des roturiers à tous les emplois. Elle déclare que les impôts seront refusés jusqu'à leur vote par les États généraux, elle réclame le rétablissement des parlements.
Cette assemblée fut suscitée par l'opposition des parlementaires de l'assemblée provinciale du Dauphiné face à la réforme judiciaire de Lamoignon retirant aux Parlements l'enregistrement des édits royaux. Cette résistance avait déjà provoqué en juin 1788 la Journée des tuiles. Bien que donnant une apparence démocratique annonçant la Révolution française, l'Assemblée de Vizille est d'abord l'expression de l'opposition des classes privilégiées aux tentatives de réformes, notamment fiscales, de Brienne.
La situation de blocage et d'impasse où sont conduits les peuples et notamment le peuple français, doit amener tous les citoyens à se ressaisir du Contrat social qu'ils ont signé et pour lequel ils se sont battus pour le conserver et le promouvoir. Seul le champ républicain, qui s'abstrait d'un gauche et d'une droite factices et d'une extrême-gauche d'aventures sans avenir, peut ouvrir des perspectives tangibles pour le long terme.
Nous reviendrons dans un prochain article sur le protectionnisme nécessaire à la mise a mort de l'ultra-libéralisme et sur l'impérative nécessité de mettre fin à une Union européenne ventre mou de la mondialisation ultra-libérale.
Pour Voltaire République, qui n'a aucune porte d'entrée médiatique, seul le relais de l'Internet est notre source de diffusion de l'information. Amis blogueurs, pensez-y en relayant le contenu de notre blog partout où vous le pourrez.
Pour aborder la situation en Guadeloupe et affirmer derechef qu'elle peut préfigurer des lendemains houleux non seulement en métropole mais dans plusieurs pays de l'Europe, il nous faut faire un petit retour en arrière.
Au préalable, nous exécutons immédiatement la nouvelle Marie-Antoinette, à savoir le turlupin Jacques Séguéla qui, dans sa vulgarité la plus absolue écrite et parlée « rodomonte » sur les ondes:
"Comment peut-on reprocher à un président de la République (à Marie Antoinette) d'avoir une Rolex (un collier de la reine)?
Enfin, tout le monde à une Rolex! Si, à 50 ans, on n'a pas une Rolex, c'est qu'on a raté sa vie".
Il semblerait que Marie-Antoinette finit sa vie bien plus mal qu'elle n'avait commencé.
Nous exécutons dans la foulée, Florence Parisot, qui confirme sur les ondes de la radio Europe ce dimanche 22 février, que c'est elle qui a demandé le rappel du ministre Yves Jégot au président de l'Arépublique, aux fins de remettre en cause les promesses sur lesquelles le secrétaire d'Etat s'était engagé à l'issue des rencontres avec les partenaires sociaux de Guadeloupe et notamment le LKP. En ce sens, la patronne du Medef porte une lourde responsabilité dans la dramatisation de tous les événements qui ont suivi le rappel du sous-ministre Jégot.
Venons-en à l'Histoire.
La guerre des farines et les accapareurs. Source Wikipedia
La guerre des farines (l'expression, contemporaine des évènements, fut retenue par l'historiographie) désigne une vague d'émeutes survenues d'avril à mai 1775 dans les parties nord, est et ouest du royaume de France. Elle fait suite à une hausse des prix des grains et consécutivement du pain du fait des mauvaises récoltes des étés 1773 - 1774. Cette révolte singulière par son échelle fut réglée par un contrôle des prix du blé (avant le retour de l'abondance) et l'intervention de la troupe. A travers la révolte frumentaire d'Ancien Régime se manifeste une crise sociale et politique. Ainsi, ces événements peuvent se lire comme une réaction envers l'édit de Turgot qui établit la libéralisation du commerce des grains le 13 septembre 1774 : en effet, cette libéralisation apparaît comme contraire à l'« économie morale », rupture par rapport au principe qui exige du roi de veiller à la sécurité de ses sujets et à leur approvisionnement en denrées.
Les analyses récentes tendent à voir cet événement non pas comme une révolte de la faim, mais comme un témoignage de l'apparition d'une maturité révolutionnaire voire d'un prélude au débat sur le Maximum révolutionnaire. Elle peut être considérée à ce titre comme un événement prérévolutionnaire ou comme un signe avant-coureur de la Révolution. La guerre des Farines s'inscrit dans un mouvement frumentaire plus ancien et annonce les révoltes frumentaires de l'An II.
La critique politique et sociale
* L'idée de libéralisation du commerce des grains est discréditée. A plus long terme, l'expérience économique éloigne les masses paysannes du gouvernement de Versailles.
* Sur le plan de la politique, l'événement provoque des remaniements en sein du gouvernement et un changement de politique royale. Turgot réclame et obtient de la part de Louis XVI la démission du Lieutenant Général de Police Jean-Charles-Pierre Lenoir.
* Certains nombres de libelles, très localisés, mettent en cause du souverain lui-même : on y trouve des attaques contre « le sang des Bourbons », mais ces écrits sont le fait d'une population cultivée et de plumes savantes. Pour Kaplan, l'événement marque le désenchantement grandissant du peuple envers le roi, une étape de la rupture du lien sacré entre le roi et ses sujets.
* Cependant, les émeutes présentent un caractère paradoxal qui témoigne bien des caractéristiques de l'économie morale mis à jour par les historiens E. P. Thompson et Charles Tilly : d'un côté une demande de retour au paternalisme royal et en même temps critique de la politique gouvernementale. Deux logiques s'affrontent : celle qui obéit aux lois de la propriété et celle qui obéit à la morale. Les émeutiers interpellent l'autorité publique et lui demande de rétablir le prix juste. En l'absence de réponse, se met en place une pratique de règles d'un ordre intérieur : le pouvoir de régulation.
* En définitive, ces émeutes sont le signe d'une aspiration à une justice alimentaire, redistributive, qui repose sur une forte demande de régulation et d'encadrement. Les émeutes frumentaires ne peuvent être assimilées à des jacqueries, au sens où elles ne sont pas dressées contre l'autorité politique, elles ne sont pas le fait d'une usurpation de pouvoir mais elles obéissent à une discipline communautaire. L'accès au grain et le juste prix du pain apparaissaient comme des droits universels.
* Sur le plan social, les sources témoignent d'une aggravation des oppositions sociales voire une polarisation sociale : une élite restreinte de fermiers riches s'oppose à une masse de plus en plus pauvre. Les paysans, qualifiés dans certaines sources d'Insurgents, sont accompagnés des syndics des villages - parfois contraints- et des curés de campagne, comme en Normandie.
Les cibles des émeutiers sont ainsi ceux qui se sont émancipés de la discipline communautaire : fermiers et grands exploitants du bassin parisien, et, dans une moindre mesure, les bourgeois des villes. Parfois encore des propriétaires nobles ou ecclésiastiques, fermiers insérés dans le système seigneurial, à l'exemple de Jacques-Pierre de Hericourt, fermier à Cagny, en Brie, seigneur de Chesany.
* De la question frumentaire à la question sociale se manifeste la faiblesse structurelle de l'économie du royaume mais aussi l'apparition d'une nouvelle rhétorique contestataire.
Aujourd'hui, les accapareurs ont pour nom: Bernard Hayot qui détient à lui seul 25% du chiffre d'affaires des 50 premiers groupe afro-antillais (source Mariannen° 618 du 21 février 2009), Robert Parfait (ça ne s'inevnete pas!), propriétaire de la licence Hyper U, Alain Huygues-Despointes et consorts...
Vizille: Réunion des États généraux du Dauphiné (source Wikipedia)
Le 21 juillet 1788, faisant suite à la Journée des Tuiles (7 juin), des notables de la région de Grenoble (bourgeois et notamment juristes) organisent l'Assemblée de Vizille dans le château de l'industriel Claude Périer. Elle réunit sans autorisation royale 50 prêtres, 165 nobles et 276 représentants du Tiers État (parmi eux Jean-Joseph Mounier et Antoine Barnave).
Elle décide de convoquer les états de la province (avec doublement du tiers état), réclame la réunion rapide des États-généraux du royaume (avec également doublement du tiers état) et l'admission des roturiers à tous les emplois. Elle déclare que les impôts seront refusés jusqu'à leur vote par les États généraux, elle réclame le rétablissement des parlements.
Cette assemblée fut suscitée par l'opposition des parlementaires de l'assemblée provinciale du Dauphiné face à la réforme judiciaire de Lamoignon retirant aux Parlements l'enregistrement des édits royaux. Cette résistance avait déjà provoqué en juin 1788 la Journée des tuiles. Bien que donnant une apparence démocratique annonçant la Révolution française, l'Assemblée de Vizille est d'abord l'expression de l'opposition des classes privilégiées aux tentatives de réformes, notamment fiscales, de Brienne.
La situation de blocage et d'impasse où sont conduits les peuples et notamment le peuple français, doit amener tous les citoyens à se ressaisir du Contrat social qu'ils ont signé et pour lequel ils se sont battus pour le conserver et le promouvoir. Seul le champ républicain, qui s'abstrait d'un gauche et d'une droite factices et d'une extrême-gauche d'aventures sans avenir, peut ouvrir des perspectives tangibles pour le long terme.
Nous reviendrons dans un prochain article sur le protectionnisme nécessaire à la mise a mort de l'ultra-libéralisme et sur l'impérative nécessité de mettre fin à une Union européenne ventre mou de la mondialisation ultra-libérale.
***
Pour Voltaire République, qui n'a aucune porte d'entrée médiatique, seul le relais de l'Internet est notre source de diffusion de l'information. Amis blogueurs, pensez-y en relayant le contenu de notre blog partout où vous le pourrez.